Edwidge Danticat, gagnante du prix 2019 National Book Critics Circle Award


Le jeudi 12 mars 2020, National Books Critics Circle Award (NBCC), l’une des distinctions littéraires les plus prestigieuses des États-Unis, décerne son prix fiction à Edwidge Danticat pour sa collection de nouvelles Everything Inside  (Knopf).
Au cours d’une semaine dominée par Covid-19, Edwidge Danticat se voit octroyer le prix 2019 du National Books Critics Circle, catégorie fiction, pour «Everything Inside.» Ce livre publié en août dernier contient huit nouvelles inspirées pour la plupart du vécu haïtien. 
Les nouvelles peignent une réalité trempée de larmes et justifient ces lignes : « Comment peut-elle rendre digestible ce qui est indigeste, déplaisant, écœurant ? [Edwidge Danticat] le fait un livre à la fois en humanisant la souffrance par le biais d’une écriture limpide et luminescente. Elle le fait en jetant des étincelles sur les ténèbres d’un quotidien infernal, en décelant le sublime tapi dans le sous-bois des misères, en révélant le courage des uns et l’endurance des autres face à des situations affreuses. » (Le Nouvelliste).
Depuis son premier roman «Breath, Eyes, Memory» (Soho Press) publié en 1994, l’auteure haïtiano-américaine s’est bâti une longue carrière littéraire marquée par la publication de romans, essais et nouvelles. Elle a gagné plusieurs prix littéraires prestigieux, tels que le NBCC 2007 pour Brother, I’m dying (Knopf), catégorie autobiographie, et American Book Award pour The Farming of Bones (Soho Press). Elle est aussi récipiendaire en 2009 du MacArthur Fellowship. 
NBCC est le seul prix dont le jury est constitué exclusivement de critiques littéraires. Fondé en 1974 et enregistré en 2006 comme une organisation à but non lucratif, NBCC octroie chaque année un prix dans chacune de ces catégories : autobiographie, biographie, critique, fiction, essai, et poésie. Les prix sont remis aux gagnants lors d’un gala qui se tient en mars. Mais à cause de la pandémie de Covid-19, le gala est reporté à une date ultérieure.
Avec «Everything Inside», Danticat a aussi gagné le prix Story Prize le 26 février 2020. Elle est aussi récipiendaire du 2020 Vilcek Prize for Litterature. Et le 26 février, American Academy of Arts and Letters annonce qu’elle intronisera Edwidge Danticat parmi ses treize nouveaux membres dans une cérémonie qui se tiendra le 20 mai prochain.
L'auteure à succès a contribué aussi dans la production de deux films : «Poto Mitan» (2009) comme auteure et narratrice, et «Girl Rising/Haiti» (2013) comme auteure. A travers ces films, elle franchit les frontières de la littérature pour embrasser son inclination activiste, avec un penchant pour la défense des droits des enfants et des femmes. Dans les deux films, sa voix douce rappelle la délicatesse de sa prose.
Edwidge Danticat a laissé Haïti à l’âge de douze ans pour rejoindre ses parents à Brooklyn, NY, mais les remous de sa terre natale ont persisté dans ses écrits. Le monde peut découvrir les charmes de son terroir à travers les livres d’une écrivaine illustre qui n’a pas honte de lier son destin à celui de son pays d’origine, aussi pauvre et décrié qu’il puisse être. Elle représente un modèle à suivre pour nos jeunes en général, et pour nos jeunes écrivains en particulier ; une étoile qui brille dans l’étendue ténébreuse du ciel d’Haïti.
Mario Malivert

Un roman et du slam pour dire le stress et les cris de nos écoliers



Le 6 février dernier, s’est tenue à l’Institution Saint Louis de Gonzague à Delmas vente-signature du roman scolaire Stress du Bulletin et du recueil de slam Des cris en slam. Ces deux ouvrages découlent d’un projet consistant en des séries d’ateliers d’écriture organisées à l’Institution du Sacré-Cœur et à l'école congréganiste de Jean-Marie Guilloux à Port-au-Prince, sous la direction de Pierre Jonas Romain, enseignant, poète et formateur, en collaboration avec Amal Boultif et Chantal Ouellet, professeures de l’université du Québec à Montréal (UQĀM). La Fondation Digicel en Haïti a fourni un support financier et logistique à la réalisation du projet et à la production des deux ouvrages, de même que le Ministère des Relations internationales et Francophonie (MRIF) et le Fonds mondial pour l’enseignement du français (FMEF). Soixante-quatre écoliers ont participé aux ateliers d’écriture, sous la supervision de douze animateurs.
Des cris en slam, recueil de poèmes slamés
« Je suis le beau temps parfois la pluie/ Le calme et parfois le bruit./ Habile et parfois hostile./ Je suis nuisible et parfois paisible. Qui suis-je ? Qui suis-je ? » (P. 19). Cet extrait du texte Je suis de Raphaëlla Ferdinand illustre bien le charme du slam. Moins rigoureux que le poème, il est conçu pour la déclamation et même la chanson. Les vers rimés comme dans les chansons, le rythme saccadé, imprévisible comme dans le jazz, les mots percutants comme dans le rap, le slam doit capter l’attention et envoûter l’imagination. Conçu pour être déclamé ou chanté, plutôt que pour être lu comme le poème, le slam se plie aisément à l’accompagnement musical, et de ce fait se montre plus commercial, plus accessible au grand public. À juste titre, les textes de Des cris en slam ont été déclamés lors de la clôture du projet en avril 2019, et les candidats jugés non seulement sur la valeur « poétique » du texte mais aussi sur la qualité de la déclamation, et tout ceci devant un public qui ne ménageait pas ses applaudissements et son support aux jeunes slameurs.
« En Haïti je vois/ Des pneus brûlés au milieu des rues./ En Haïti je vois/ Des personnes laisser leurs quartier/ À cause de l’insécurité. » (P. 61). Ces vers du texte Nature d’Haïti d’Hyppolite Anne Geneviève, d’une simplicité déconcertante, d’une candeur inouïe, démontrent l’importance de ce projet d’écriture comme exutoire pour ces jeunes qui sont, tout comme le reste de la population, confrontés au marasme actuel qui engloutit le pays. Ce sont là de vrais cris de dépit lancés par une écolière devant l’état lamentable de son pays. Elle n’est pas la seule à lancer ces invectives. Frantzcia Beauvais va encore plus loin avec ces vers de son texte Misère : « Quelle misère ?/ Misère de quoi ?/ Des soucis/ Qui nous remplissent l’esprit./ Mais de quoi avoir peur ?/ Des autres ?/ Des manifestants ?/La misère règne sur Haïti/ Misère, misère, misère/ Oh misère ! » Ici, le dire est cru, dru, sans maquillage. C’est ainsi que nos enfants crient, et nous ne savons même plus comment les rassurer que demain sera meilleur.
Stress du bulletin, un roman scolaire
Ce roman à multiples mains est écrit par 22 élèves de la 9e année fondamentale de l’école congréganiste de Jean-Marie Guilloux. Il se déroule autour d’Edner Jean-Louis, un élève intelligent mais turbulent, qui s’apprête impatiemment à débuter en 7e année fondamentale. Edner va-t-il pouvoir honorer les promesses faites à sa mère d’adopter un comportement exemplaire, ou va-t-il finir par céder comme auparavant aux pulsions de faire le clown en classe et de rendre la vie difficile à ses enseignants ? Va-t-il regretter à la fin sa décision de se joindre à la bande Ti Pa Bon dont la mission est de protéger les écoliers de son établissement ?
L’histoire est bien ancrée dans l’univers actuel des jeunes. Les écoliers naviguent entre l’exigence de leurs parents et celle de leurs directeur et enseignants. Les examens d’évaluation se voient comme des situations de stress (d’où le titre du livre). Le choix de tricher pour obtenir de bonnes notes est au centre de la trame, et reflète bien notre société actuelle minée par le spectre de la corruption. Même l’histoire de se constituer en bande résonne avec des faits d’actualité.
Des cris en slam et Stress du bulletin : deux ouvrages qui impressionnent par leur capacité à donner la voix à des écoliers et à des écolières. Ce sont des premiers pas qui déboucheront à coup sûr, pour certains de ces jeunes, sur un parcours littéraire, alors que pour d’autres, ils resteront un mémento qu’ils garderont jalousement dans l’étui des joyeux souvenirs de leur adolescence.
Mario Malivert

Ak Fédia Stanislas, se konfidans sou konfidans



Youn nan pri literè ki gen plis prestij an Ayiti se Prix Deschamps. Pou ane 2019 la, se Fédia Stanislas ki rive genyen pri sa a avèk «Konfidans», yon woman an kreyòl ki gen 124 paj.
Liv la chaje ak konfidans Wozi, naratè a, fè. Li pataje sa l panse, jan l wè lemonn, jan l konprann lavi, jan l wè tèt li nan rapò l ak manman l, ak tonton li, ak lòt fanmi l e zanmi l yo, nan yon langaj klè, menm lè l ap pale de sijè ki sansib anpil. Otè ya dekri panse l yo ak fraz kout, senp, men chaje ak imaj, pwovèb, koutim, kilti ayisyen an, sa ki bay liv la yon alan powetik.
Liv la kòmanse ak yon ti chan nou abitye tande : « Tifi ki pa konn lave pase/chita kay manman w », ki pa trete fanm byen, e ki leve plim sou do Wozi. Li mande tèt li « Pouki se tifi sèlman yo tounen lakay manman yo ? » Yon kesyon ki pral debouche sou yon pledwari kont vyolans gason sou fanm : « Depi yon fanm ta chwazi dezobeyi oubyen leve vwa l pi wo pase mari l, baton met pye…Minis Jistis la konn bat madanm li tou. », sou jan legliz ankouraje gason pran pye sou fanm, e sou divizyon nan sosyete a : « …pouki gen moun anwo ak moun anba, pitit Desalin ak pitit Petyon. Pouki? » Nan tout rès woman an, Wozi pa janm bouke poze tèt li kesyon e pataje opinyon l sou plizyè sijè. Premye chapit la fini ak lanmò papa l, Benis, nan Pòtoprens, avèk antèman l nan legliz Sen Lwi.
Manman Wozi gen yon plas santral nan liv la, men relasyon ant de medam yo konplike, soti nan zafè Benis ki pa vrèman papa Wozi, rive nan jan manman Wozi ankouraje l fè nenpòt vye zak pou lajan. Sa ki tris, nan tout brimad Wozi sibi nan lavi a, menm kot manman l li pa jwenn konsolasyon, kòm sa ta dwe ye. Ton Djo, tonton l, se yon lòt pèsonaj kle liv la. Se li ki mennen fanmi pa l ak fanmi manman Wozi soti Karakoli rive Duarte nan Sendomeng. Yon paj grangou ak imilyasion pral louvri nan Duarte, ki pral fòse Wozi aksepte fè sa l pa vle fè, antòtye tèt li nan yon relasyon ak yon sèten Pablo, ki swadizan renmen l, men ki bat li lè lide l di l. Wozi tonbe viktim vyolans gason sou fanm, sa l t ap denonse nan premye chapit liv la.
Byenke Pablo te okipe manman l byen, pèmèt li jwenn laswenyaj pou maladi kansè, Wozi pa t janm renmen l. Li ta ka petèt tolere Pablo, men mouche a renmen bat fanm. Konsa, Wozi fè yon jan li chape poul li, li tounen Pòtoprens, nan katye Kafoufèy, kote manman l te rete. Eske lavi a pral ba l yon kalmi nan peyi l ? Eske bagay yo pa pral pi mal pou li? Eske l ap janm kwaze ak Pablo sou chimen l ankò? Tout sa yo se kesyon Fedia Stanislas pral reponn nan dènye sis chapit liv la.
Meyè pati woman «Konfidans» la se premye chapit yo, kote otè a frape imajinasyon nou ak refleksyon ki te siprann nou pandan l t ap chame nou tou. Senserite l nan fason l livre kè Wozi bay lektè a pote yon aspè tou nèf nan woman ayisyen. Ou santi pwezi a pa twò lwen pwoz la. Men tank istwa a ap deplotonnen, ou vin rejwenn menm refleksyon yo, ki dèfwa marye ak yon seri de pwovèb oubyen slogan popilè. Sa vin kase nan frechè tèks la. Pi devan nan dènye chapit yo, evènman yo vin parèt brip sou kou, san ase eksplikasyon ak preparasyon. 
Kontrèman ak kèk ganyan Prix Deschamps ki pa kontinye pibliye liv, nou rete kwè ke Fedia Stanislas gen plizyè lòt liv nan dyakout li, an kreyòl e an fransè, k ap reprezante lòt opòtinite pou li pou l rafine stil li. Konsa, Prix Deschamps li genyen an a se tankou van ki gonfle nan vwal li pou l gen plis fòs toujou pou l deplwaye zèl li sou literati ayisyen an.
Mario Malivert

Littérature et politique, un glissement nécessaire


Le no 14 (Vol. I) de la revue littéraire Legs et Littérature aborde le thème Littérature et politique. Cette revue semestrielle dirigée par Dieulermesson Petit Frère, et qui a pour rédactrice en chef Mirline Pierre, a eu son premier numéro en janvier 2013. Ce présent numéro de 319 pages, dirigé par Claudy Delné, PhD, bénéficie de l’apport de vingt-sept rédacteurs et contributeurs, et « se veut une enquête critique visant à explorer, à partir d’une variété de perspectives méthodologiques et de préoccupations formelles, cette dialectique ambitieuse du discours littéraire et des différents modes d’inscription du fait politique. » (page 14). 
D’entrée de jeu, dans l’éditorial, M. Delné annonce la couleur en visitant la réaction controversée de Dany Laferrière face au scandale du blackface du Premier ministre canadien Justin Trudeau, suite à la publication le 18 septembre 2019 par le magazine américain Times d’une photo du Premier ministre déguisé en Aladin, prise il y a presque vingt ans. M. Delné souligne que l’immortel « a raté une occasion en or de mettre la littérature au service du politique » (page 6).
Treize textes composent la première partie de la revue, qui en compte quatre, chacun abordant un sujet où la littérature chevauche la politique, vice versa. Mohammed Ajbilou parle, dans le premier, de l’intellectuel engagé, en se demandant quelle forme d’activisme qu’aurait pu adopter Jean Paul Sartre au XXIe siècle. Dans le deuxième, à partir des romans Le regard du roi de Camara Laye et Le camp des saints de Jean Raspail, Claudy Delné expose l’utilisation du concept de race par les Blancs pour « rationaliser l’asservissement des autres peuples. » (Page 39). Dans le troisième, Pascaline Zang Ndong parle de l’homosexualité et du pouvoir à travers quelques romans de la Nouvelle génération d’écrivains africains qui embrassent « une littérature irrévérencieuse, ou mieux, subversive tant sur la forme que sur les thèmes abordés, qui jadis étaient tabous. » (Page 71).
Les autres textes de la première partie abordent des thèmes qui se révèlent aussi percutants que ceux susmentionnés. Que ce soient, entre autres, le « legs idéologique des mémoires du général Toussaint Louverture […] dans l’histoire littéraire africaine » (Page 89) ou l’apport d’auteurs féministes africains « contre toute pratique sexo-discriminatoire qui amplifie la réification sexuelle des femmes » (page 111), ou encore l’exploration de « nouvelles formes de sexualité dans les sociétés et leur lien avec l’émigration » (page 145) dans le roman Un ailleurs à soi d’Émmelie Prophète. 
Six autres textes complètent la première partie. Est à souligner l’analyse stylistique de Konan Luc Stéphane Brou du recueil de poèmes Morsure d’Eburnie par Henri N’Koumo qui « se fait poète, historien et militant lorsqu’il poétise la crise militaro-politique vécue par son pays, la Côte d’Ivoire, depuis l’an 1999. » (P.165). Louis Bertin Amougou, lui, parle de deux pôles du champ littéraire africain : les partisans de l’engagement politique, d’un côté, et ceux de « l’écriture », de l’autre. Enfin, Melissa Quirino Scanhola décrit comment l’écrivain algérien Kateb Yacine a pu surmonter son « ‘exil intérieur’ engendré par l’alphabétisation dans la langue colonisatrice [la langue française] et les ruptures avec ses compatriotes. » (P. 241).
La deuxième partie de la revue présente un entretien d’Alma Abou Faker avec David Le Breton, adressant les procédés de répression corporelle des pouvoirs ou des autorités carcérales dans le roman arabe contemporain. Deux comptes rendus de lecture forment la troisième partie : Sade et ses femmes, par Marie Desvignes, et Souffles d’outre-cœur par Koukouvi Dzifa Galley. Et la quatrième présente un récit de Sybille Claude, Moi Fatou, femme coupée, et un poème d’Indran Amirthanayagam, Le mariage global.
Mario Malivert

Georges Castera pale…Pwenba!


Lè m bezwen griyen dan m, nwaye kalkil, bliye jan lavi rèd nan peyi isit, tuipe ensekirite k ap taye banda, se Pwenba mwen li, kote Castera ekri « Se sa !/M ta fè si, M ta fè sa./Se sa !/Sizoka si ta nan/ka,/songe gen 2 ka/nan kaka. » 
Lè m bezwen kriye sou Pòtoprens, konstate jan figi l blèm tankou pen rasi, jan twotwa yo (lè genyen) sal tankou peny ti dan, se Pwenba mwen li, kote Castera kwaze « Pòtoprens tou long atè/nan riyèl malsite, nan riyèl mal pou wont ». 
Lè m bezwen ekri kreyòl, siwote kreyòl, karese kreyòl, se Pwenba mwen li, kote Castera deplòtonnen mo lanmou, mo dous, mo siwo myèl. Ou ka chante lanmou, men se pa fouti tankou Castera. Ou ka jouke lalin, monte zetwal, men se pa fouti tankou Castera. 
Lè m bezwen kalonnen dirijan yo ak biswit leta, badijonnen devan pòt figi yo ak labou Kwabosal, se Pwenba mwen li, kote Castera pa manke met pou yo. « Wi koupab, Yo koupab ! » vre wi. Depi 216 an, y ap fè Ayiti monte lesyèl pa do, « yo pa janm regle anyen/yo pa janm prevwa/menm yon fwa pafwa ». 
Lè m sonje goudougoudou, jan Pòtoprens te tounen lanmidon, jan « Andidan kay beton patapouf, tout moun mouri frèt », jan « Nou bati lèd/nou mouri lèd/, nou mouri/bèl mouri nou », jan timoun te chante « m koupe fache ak beton/M pa zanmi beton ankò./beton touye manman m/beton touye papa m/ beton kite m san anyen», se Pwenba mwen li, paske nan de mo twa uityèm, Castera blayi Pòtoprens devan boul je nou, de pye anlè, tankou chen ki pran nan sosis. 
Si m ta vle pèdi jekwazandye m, mete lafwa m akote, se Pwenba pou m ta li, kote Castera pa gen tan pou « lapriyè yenyen », kote l denonse lidè legliz « ki sèvi ak lanmò plizyè milye moun/pou fè moun ki vivan pè,/fè yo kwè yo antò ». Men avan legliz kondane powèt la, sonje sa li vle wè, menm jan ak tout kretyen konsekan, se yon « relijon damou ».
Lè m vle santi m lib pou m ekri sa m vle, tout sa k jèmen nan kè m, san m pa bride l ni sansire l; lè m vle pa pè ki sa lè zòt di oubyen panse ; lè m vle abiye lespri m ak yon vès kite mele m avè yo sou yon chemiz ki foute m avè yo ; se Pwenba mwen li, kote Castera ekri sa k nan lide l, kote l demontre li gen la lwa djòl li. Yo te mèt rele l kokorat, yo te mèt dezabiye l toutouni, ki mele l. Li pale li pale nèt, li ekri li ekri nèt. Poudayè, ou pa ka manyen l kote l ye ya.
Mwen p ap kriye viv lanfè ! tankou Castera, men m ap di viv lavi, viv lanmou, viv yon gwo potorik gason ki kite yon lapawoli majè, yon zèv tout koulè pou jenerasyon powèt ak tout sa k pa powèt yo. Bon latravèse gason kanson. Yon lòt fwa ankò, ou pran douvan pou klere chimen pou nou.
Georges Castera, Pwenba (pwezi), Port-au-Prince, Atelier Jeudi Soir, 2012
Mario Malivert