Un roman et du slam pour dire le stress et les cris de nos écoliers



Le 6 février dernier, s’est tenue à l’Institution Saint Louis de Gonzague à Delmas vente-signature du roman scolaire Stress du Bulletin et du recueil de slam Des cris en slam. Ces deux ouvrages découlent d’un projet consistant en des séries d’ateliers d’écriture organisées à l’Institution du Sacré-Cœur et à l'école congréganiste de Jean-Marie Guilloux à Port-au-Prince, sous la direction de Pierre Jonas Romain, enseignant, poète et formateur, en collaboration avec Amal Boultif et Chantal Ouellet, professeures de l’université du Québec à Montréal (UQĀM). La Fondation Digicel en Haïti a fourni un support financier et logistique à la réalisation du projet et à la production des deux ouvrages, de même que le Ministère des Relations internationales et Francophonie (MRIF) et le Fonds mondial pour l’enseignement du français (FMEF). Soixante-quatre écoliers ont participé aux ateliers d’écriture, sous la supervision de douze animateurs.
Des cris en slam, recueil de poèmes slamés
« Je suis le beau temps parfois la pluie/ Le calme et parfois le bruit./ Habile et parfois hostile./ Je suis nuisible et parfois paisible. Qui suis-je ? Qui suis-je ? » (P. 19). Cet extrait du texte Je suis de Raphaëlla Ferdinand illustre bien le charme du slam. Moins rigoureux que le poème, il est conçu pour la déclamation et même la chanson. Les vers rimés comme dans les chansons, le rythme saccadé, imprévisible comme dans le jazz, les mots percutants comme dans le rap, le slam doit capter l’attention et envoûter l’imagination. Conçu pour être déclamé ou chanté, plutôt que pour être lu comme le poème, le slam se plie aisément à l’accompagnement musical, et de ce fait se montre plus commercial, plus accessible au grand public. À juste titre, les textes de Des cris en slam ont été déclamés lors de la clôture du projet en avril 2019, et les candidats jugés non seulement sur la valeur « poétique » du texte mais aussi sur la qualité de la déclamation, et tout ceci devant un public qui ne ménageait pas ses applaudissements et son support aux jeunes slameurs.
« En Haïti je vois/ Des pneus brûlés au milieu des rues./ En Haïti je vois/ Des personnes laisser leurs quartier/ À cause de l’insécurité. » (P. 61). Ces vers du texte Nature d’Haïti d’Hyppolite Anne Geneviève, d’une simplicité déconcertante, d’une candeur inouïe, démontrent l’importance de ce projet d’écriture comme exutoire pour ces jeunes qui sont, tout comme le reste de la population, confrontés au marasme actuel qui engloutit le pays. Ce sont là de vrais cris de dépit lancés par une écolière devant l’état lamentable de son pays. Elle n’est pas la seule à lancer ces invectives. Frantzcia Beauvais va encore plus loin avec ces vers de son texte Misère : « Quelle misère ?/ Misère de quoi ?/ Des soucis/ Qui nous remplissent l’esprit./ Mais de quoi avoir peur ?/ Des autres ?/ Des manifestants ?/La misère règne sur Haïti/ Misère, misère, misère/ Oh misère ! » Ici, le dire est cru, dru, sans maquillage. C’est ainsi que nos enfants crient, et nous ne savons même plus comment les rassurer que demain sera meilleur.
Stress du bulletin, un roman scolaire
Ce roman à multiples mains est écrit par 22 élèves de la 9e année fondamentale de l’école congréganiste de Jean-Marie Guilloux. Il se déroule autour d’Edner Jean-Louis, un élève intelligent mais turbulent, qui s’apprête impatiemment à débuter en 7e année fondamentale. Edner va-t-il pouvoir honorer les promesses faites à sa mère d’adopter un comportement exemplaire, ou va-t-il finir par céder comme auparavant aux pulsions de faire le clown en classe et de rendre la vie difficile à ses enseignants ? Va-t-il regretter à la fin sa décision de se joindre à la bande Ti Pa Bon dont la mission est de protéger les écoliers de son établissement ?
L’histoire est bien ancrée dans l’univers actuel des jeunes. Les écoliers naviguent entre l’exigence de leurs parents et celle de leurs directeur et enseignants. Les examens d’évaluation se voient comme des situations de stress (d’où le titre du livre). Le choix de tricher pour obtenir de bonnes notes est au centre de la trame, et reflète bien notre société actuelle minée par le spectre de la corruption. Même l’histoire de se constituer en bande résonne avec des faits d’actualité.
Des cris en slam et Stress du bulletin : deux ouvrages qui impressionnent par leur capacité à donner la voix à des écoliers et à des écolières. Ce sont des premiers pas qui déboucheront à coup sûr, pour certains de ces jeunes, sur un parcours littéraire, alors que pour d’autres, ils resteront un mémento qu’ils garderont jalousement dans l’étui des joyeux souvenirs de leur adolescence.
Mario Malivert

2 commentaires:

  1. Je pense que ce roman decrit deja ce que les etudiants ont vecu durant les annees passees. L'influence du milieu change completement l"individu, les problemes economiques politiques etc...Les etudiants ont tous les problemes sans distinction aucune surtout avec ce genre de leaders qui ne font qu'enterrer le pays dans des decombres corruptrices.
    Notre cher pays a besoin d'un revirement total pour qu'il reprenne sa course normale. Mon cher j'apprecie votre perseverance,votre sacrifice dans l'Organisation REPHEKA que vous dirigez dans le but de donner des soins medicaux au peuple haitien. Continuez a encourager nos ecoliers et ecolieres afin qu'a L'avenir nous pourrons avoir un pays bien structure et capable de nourrir son peuple.
    Merci,
    Que Dieu vous garde, vous guide et protege votre famille entiere
    Robert Julien

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    1. Merci, mon cher Robert, pour tes mots d'encouragement.

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