Sérant et sa guerre de cerfs-volants

Par Mario Malivert
Paru dans Ticket Magazine (Le Nouvelliste) du 10 decembre 2015

Le quatrième roman jeunesse de Claude Bernard Sérant, La guerre des cerfs-volants, nous transporte dans un passé pas trop lointain, quand les cerfs-volants dansaient sous les ailes du vent tempétueux de la période de Carême. Mais loin de s’engager dans un passe-temps paisible, les cerfs-volistes se livraient souvent à une guerre sans merci pour maintenir le droit de slalomer dans le ciel avec leurs oiseaux de papier et de plastique.
Toute bonne histoire recèle souvent un peu de David contre Goliath. Dans La guerre des cerfs-volants de Claude Bernard Sérant, David prend différents visages, mais Goliath est le terrible Thompson Thomas, « un adolescent de seize ans faisant plus vieux que son âge », muni d’un grandou féroce, et dont « la colère déferle dans le ciel, sans bornes et violente ». L’enjeu est économique : Thompson se venge de la mauvaise vente de ses cerfs-volants.
En face du méchant Thompson, se dresse une clique de freluquets: Marc-Aurèle, « un petit garçon au visage de pleine lune » ; Blockzo, « maigre, les yeux grands, le visage étroit » ; Elie, le concurrent de Thompson, avec son propre négoce de cerfs-volants ; Etienne, dont le cerf-volant en forme d’étoile à cinq branches porte un billet doux à Julie, la fille la plus belle du quartier ; Lubin ; Ernest ; et Babou, « un petit garçon de dix ans aux yeux pétillant de malice. » N’oublions pas les filles : Marguerite avec son cerf-volant en forme d’étoiles à six-branches et Sylvie, dont le cerf-volant prend la forme « [d’] un magnifique papillon aux ailes fragiles mouchetées d’argent».

Ronald Mevs: Mutations

Par Mario Malivert
Paru dans le Nouvelliste du 4 decembre 2015
 
Pour marquer les 40 ans de carrière de l’artiste Ronald Mevs, Jacinthe Vorbe Zephir et Micheline Vorbe ont livré à notre délectation un livre somptueux qu’elles veulent à la hauteur de l’œuvre immense et complexe de Ronald Mevs. Et elles ont réussi leur pari. En effet, ce livre de 205 pages, en couleur, bilingue (français/anglais), avec du papier haut de gamme, des textes soigneusement sélectionnés, et des photos des œuvres de l’artiste, est un vrai régal pour les yeux, pour les sens, et même pour les doigts. C’est définitivement un document de référence, à conserver jalousement dans sa bibliothèque.
Ronald Mevs : Mutations s’ouvre sur une compilation d’articles à propos de Ronald Mevs, et finit avec un échantillonnage des œuvres de l’artiste : tableaux, dessins, sculptures, totems, boucliers, scarabées, tables, portes, pirogues, etc. Plusieurs courants thématiques traversent les articles, certains à répétitions. L’accent est mis non seulement sur la dimension humaine de Mevs, sur le côté intime, poétique de l’artiste ; mais aussi sur la technique, la praxis. Certains de ces auteurs ont côtoyé l’artiste au fil des ans, ou même entretenu avec lui une amitié de longue date, ce qui nous donne l’impression, en tant que lecteurs, de nous immiscer dans des confidences. Ainsi, avant même d’arriver à la deuxième partie du livre, on se sent préparé, avisé, comme quand on rentre dans la chambre à coucher d’un ami. D’autres montrent le détachement du critique d’art, de l’historien, s’attardant sur l’œuvre dans ses dimensions pratiques et ses particularités méthodologiques.