Notre Eglise et le sous-développement de Sony Lamarre Joseph

Par Mario Malivert


Un grand titre, Notre Eglise et le sous-développement, qui exige l’attention, et qui a bien vendu à la dernière édition de Livres en folie. Enfin une perspective chrétienne au sous-développement ! N’ai-je pas lu quelque part que le christianisme a beaucoup contribué au développement, par les valeurs qu’il prône, telles que l’intégrité et la responsabilité, sur lesquelles repose le système de crédit bancaire ? Mais, peut-être ici, Mr. Sony Lamarre Joseph va démontrer le contraire, que le christianisme, au moins tel que pratiqué en Haïti, débouche davantage sur la paupérisation que sur la création de richesse et de l’amélioration du standard de vie. On a donc hâte de lire les idées de l’auteur sur le rôle de l’Eglise dans le sous-développement. Lui qui s’est taillé une réputation d’expert en communication, peut-être est-il aussi une autorité en matière de développement.
     Dans l’introduction, Mr. Joseph précise qu'il écrit ce livre « pour éveiller en chacun des acteurs ce désir d’agir autrement pour faire changer les choses pour la gloire du Seigneur et pour le progrès de la communauté » (page 18) et pour une « meilleure utilisation de l’arme de la communication au niveau des églises pour aider les gens à comprendre leur importance dans tout processus de changement. » (Page 19). Bon, ces objectifs assez vagues ne disent rien du titre. On s’attendait plutôt à une emphase sur le sous-développement.

      Le livre est divisé en quatre parties. La première a pour titre « Et si on communiquait mieux… » C’est un appel aux prédicateurs et aux dirigeants des églises de cesser « le discours faisant croire aux fidèles de se résigner avec la pauvreté… » Selon l’auteur, "le discours dans beaucoup d’assemblées fait pulluler des mendiants et des irresponsables au niveau de la société ». Plus loin, l’auteur parle de la nécessité par les prédicateurs « de valoriser les autres » pour les porter à changer, et d’encourager leurs efforts.

     La deuxième partie du livre a pour titre « C’est la parole qui transforme. » Ici, c’est un appel aux prédicateurs de prêcher la Parole de Dieu, qui seule peut effectuer le changement tant souhaité chez les fidèles.
      La troisième partie, intitulée « L’Eglise et le sous-développement d’Haïti », devrait être la partie centrale du livre, puisqu’elle parle enfin du titre. Le premier fléau mentionné est le manque de planning familial, encouragé d’ailleurs, selon l’auteur, par les églises : « Le discours véhiculé dans plein d’églises haïtiennes, selon lequel il faut mettre au monde des enfants (Pitit se byen pov malere) fait beaucoup de tort à la société. » (Page 65). Puis, l’auteur, comme dans les deux premières parties, met le cap sur les pasteurs et prédicateurs, comme obstacles au développement, parce qu’ils ne sont pas des leader-serviteurs, parce qu’ils refusent de recevoir de feed-back, parce qu’ils ont peur de la critique, parce qu’ils ont un sentiment d’infériorité ou de culpabilité, ou parce qu’ils ont des attentes irréalistes.
       La quatrième partie, « Le citoyen chrétien : Un acteur d’influence » exhorte le chrétien à voter dans les élections, à être sel et lumière de la terre, à ne pas critiquer le port de pantalons par les sœurs, à ne pas être une occasion de chute, et enfin à bien gérer ses soucis.
      
       Il faut noter qu’après chaque partie, l’auteur propose des « histoires qui inspirent.» Ce sont des histoires écrites ou non par l’auteur qui recèlent des leçons assez importantes, mais qui n’ont rien à voir avec le sous-développement.
       
        Enfin, après la lecture de la dernière page du livre, l’auteur nous laisse sur nos faims. Il n’a pas vraiment développé sa thèse. Il a surtout critiqué les pasteurs et prédicateurs, qui représentent selon lui des facteurs du sous-développement, par leur discours désuet et leur refus de sortir de leurs zones de confort. Rien n’est dit sur le taux élevé de chômage, sur le niveau exécrable de l’éducation, sur l’inexistence de la production nationale, sur le manque d’infrastructures, sur la faiblesse des institutions étatiques, etc.

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